Je ne sortirai plus jamais.
Journal de confinement
Nous te voyons, ciel, nous te voyons.
Tu fais pousser
une cloque après l'autre,
un pustule après l'autre.
C'est ainsi que tu augmentes l'éternité.
Nous te voyons, terre, nous te voyons.
Tu abandonnes
une âme après l'autre. C'est ainsi que respirent les incendies du temps.
[Paul Celan, Nous te voyons]
Wir sehen dich, Himmel, wir sehn dich.
Pocke um Pocke
treibst du hervor,
Pustel um Pustel.
So mehrst du die Ewigkeit.
Wir sehen dich, Erde, wir sehn dich.
Seele um Seele
setzest du aus,
Schatten um Schatten.
So atmen die Brände der Zeit.
[Paul Celan, Wir sehen dich]
Cher virus,
Il y a des minutes où je regarde son visage qui me sourit et je suis presque heureux que tu sois là et que tu tues tant de personnes dehors. Sans toi, nous ne serions jamais restés enfermés l'un avec l'autre tant de jours. Aujourd'hui, je bois sa présence symbiotique depuis une semaine et sans devenir fou si ce n'est à travers cette sensation d'être parfois consumé par lui.
MAJ : 04/04/2020
Au bout de six semaines, finirons-nous pas nous entre-dévorer ? Non pas à l'issue d'un combat, mais par une sorte de consentement mutuel. Chaque jour, l'un pourrait manger une partie non-vitale de l'autre. Peut-être que l'énergie tirée du corps de l'autre nous permettrait de régénérer les organes consommés. Ainsi, on pourrait s'entre-nourrir indéfiniment comme d'ailleurs nous le faisons déjà avec nos esprits.